UA-140390347-1 Un soldat et un homme politique | Château de Bourmont
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Un soldat et un homme politique (1800-1830)

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1800: un tournant dans cette vie aventureuse

Le 14 février 1800, Bourmont rencontre Bonaparte pour la première fois aux Tuileries. La conversation reproduite dans les archives révèle un dialogue fait d'admiration et de méfiance réciproques ("Vous êtes gentilhomme, je le suis à peu près." déclare Bonaparte à Bourmont). Bonaparte affirme qu'il n'a aucune intention de servir la cause royale et tente habilement de gagner l'amitié de Bourmont en le corrompant ("Si vous voulez être mon ami, je serai le vôtre. On dit que vous avez perdu une fortune considérable, je pourrai vous en refaire une plus grande." (...).) Au refus de Bourmont, il répond: "Eh bien: si vous voulez me servir, je vous ferai entrer au gouvernement." Puis, Bonaparte se fait plus menaçant: " (...) si vous faites quelque chose contre moi, j'en serai fâché maintenant que j'ai l'honneur de vous connaître, mais je vous ferai casser la tête. L'homme qui gouverne n'a pas d'entrailles.(...)"

Bourmont, repoussant ces avances, reste dans l'expectative, travaillant à la pacification des régions de l'ouest tout en restant dans l'environnement immédiat du gouvernement. Il fréquente ainsi fréquemment Fouché et souvent le Premier consul. Cette période s'envisage donc à travers le prisme de ses relations complexes avec ces deux hommes. Le pouvoir des consuls n'étant pas assuré, Fouché, politique et connaissant l'influence de Bourmont, se demande de quel côté va pencher le régime. En effet, entre le 6 mai et le 2 juillet 1800, Bonaparte part pour l'Italie et remporte le 14 juin la bataille de Marengo. Dans le cas où Bonaparte serait tué, Fouché cherche à se ménager toutes les personnes influentes du monde politique parisien alors en effervescence, et notamment dans le camp royaliste. Il déclare ainsi à Bourmont: "Soyez le chef de tous les royalistes, livrez m'en quelques uns afin de pouvoir mieux protéger les autres, et je vous aiderai à augmenter votre influence sur tous. Je conserve une grande influence sur les Républicains prononcés et si vous vous liez à moi, nous pourrons disposer à notre gré du sort de l'Etat puisque nous disposerons des deux partis où se sont classés les hommes de courage. Nous aurons pour adversaires ces imbéciles de Modérés, mais vous savez bien que ce sont des poltrons fort peu à craindre." (conversation relatée par Bourmont dans un mémoire du 1er septembre 1804 adressé au Grand Juge Regnier et conservé aux Archives nationales).

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Joseph Fouché, ministre de la police  

 

En octobre 1800, Bourmont a de nouveau un long entretien avec Bonaparte, discussion qui a été rapportée par le duc de la Trémoille à Louis XVIII. Bonaparte est devenu méfiant envers Bourmont dont il apprend qu'il a distribué des subsides anglais dans l'ouest. Bonaparte lui fixe un ultimatum en le menaçant d'exil, voire d'exécution s'il ne perd pas son influence..."(...) je crois que la meilleure manière de détruire un parti, c'est de perdre les chefs et de bien traiter les masses. Je ne renverrai pas tous les chefs (...) mais vous M. de Bourmont , je ne puis vous regarder comme mon ami. Vous avez conservé des relations avec l'Angleterre, vous avez encore le désir de servir les Bourbons, au moins vous vous vantez de leur rester attaché..."

L'échange se poursuit tel un duel verbal entre les deux hommes, il sonne comme un avertissement persiflant de Bonaparte qui déclare encore: "(...) je serai fâché que vous ayez préféré de rester mon ennemi; vous avez des moyens qui auraient été utiles à la Patrie; mais si vous préférez lutter contre moi, si tous ceux que vous influencez encore restent éloignés du gouvernement, vous en serez les victimes: c'est le pot de terre contre le pot de fer." Il conclut: "Vous savez qu'on est coupable, en politique, quand on inquiète celui qui gouverne, et vous avez trop d'influence."

La prison et l'exil politique (1800-1808)

 

A la suite de l'attentat manqué contre Bonaparte le 2 décembre  1800, Bourmont est arrêté par la police de Fouché qui l'a habilement mêlé au complot - alors qu'il n'y a joué aucun rôle - pour l'emprisonner au Temple puis à la citadelle de Besançon pendant 4 ans. Bonaparte donne plusieurs ordres en 1801 et 1803 pour mettre Bourmont au secret et souligne combien ce dernier peut être dangereux. Il craint notamment ses relations avec "l'étranger" et en particulier avec le gouvernement anglais. Bourmont finit par s'évader en 1804 et écrit, non sans humour, cette lettre à Fouché: "Monsieur le Sénateur, le besoin de vivre libre m'a fait sortir de la citadelle de Besançon. Ma santé ne pouvait se rétablir que par une grande tranquillité d'esprit et beaucoup d'exercice."  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bourmont obtient alors du gouvernement un passeport pour s'exiler au Portugal, à Lisbonne. Bonaparte donne lui-même ses ordres à Fouché: "Monsieur Fouché, ministre de la Police Générale, il n'est pas convenable de permettre à Monsieur de Bourmont de s'embarquer à Nantes; mais il peut se rendre par terre à Lisbonne, où il s'embarquera." (Correspondance de Napoléon). Bonaparte qui prévoit de l'envoyer aux Etats-Unis craint réellement que Bourmont ne rejoigne l'Angleterre de Nantes et/ou qu'il ne joue un rôle dans sa région d'origine.

Sur place, ce dernier se lie d'amitié avec Junot qui accepte son offre de servir dans l'armée impériale. Ainsi, attaché à l 'Etat-Major de la Division de Loyson, il participe au combat de Vimeiro (août 1808) qui se solde par une défaite française face aux Anglais. Il réussit, cependant, à organiser convenablement et méthodiquement la retraite. Après la capitulation de Cintra (20 août 1808), Junot offre une place à Bourmont et à sa famille sur l'un des navires de la flotte française qui doit être ramenée en France par les vaisseaux anglais. Junot lui promet de voir l'Empereur à son retour et d'obtenir sa liberté...

 

Nouvelle arrestation et solution politique (1808-1810)

Malheureusement, fin octobre 1808, le navire qui transporte Bourmont est détourné par une tempête et le conduit en baie de Quiberon. C'est alors que Fouché, toujours dans l'ombre, qui n'a reçu aucune des garanties promises de la part de l'empereur, fait arrêter à nouveau Bourmont. Sans ordre formel, il peut faire arrêter celui qui revient dans l'illégalité. Détenu à Nantes puis relâché le 12 février 1809, il est assigné à résidence chez son beau-frère et sa belle-sœur, le baron et la baronne de Vezins, en Maine-et-Loire près de Cholet. Malgré les démarches multipliées par ses proches parents auprès de Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre et auprès de Fouché, aucune n'aboutit. Pour sortir de l'impasse et recouvrer définitivement sa liberté, Bourmont demande à servir dans les armées impériales. Le 24 avril, l'Empereur prend lui-même la décision de l'envoyer à Naples, loin de l'ouest et de manière "à être surveillé". Après une longue attente, Bourmont reçoit en mai 1810 la lettre de service lui enjoignant de rejoindre l'armée d'Italie avec le grade d'adjudant-commandant. A la lumière des différentes sources consultées et des archives familiales, cette décision apparait comme un choix politique qui permettait au gouvernement comme à Bourmont, épris d'action, de trouver une issue à une situation devenue intenable. Après "onze ans de malheur", selon ses propres termes, cet engagement lui permet d'assurer sa liberté et de mettre son épée au service de son pays.

Sous surveillance en Italie

Bourmont ne prend conscience que tardivement qu'on l'a nommé à ce poste pour l'éloigner et le surveiller. Le climat ne lui convenant pas, il tombe gravement malade et demande alors un congé. Celui-ci lui sera constamment refusé malgré toutes les démarches entreprises et les enquêtes diligentées auprès des médecins par le ministre de la Guerre. La décision ne peut venir que de l'empereur lui-même. Or, celui-ci donne pour toute réponse: "puisque cet officier se trouve placé et qu'il a fait la guerre avec des troupes, je pense qu'on peut l'employer en Italie et le laisser là. Il faut surtout l'empêcher de venir dans l'Ouest."(Archives de la Guerre, Dossier Bourmont, pièce 70). Malgré l'état préoccupant de celui-ci, ce congé ne sera jamais accordé. Bonaparte est même furieux lorsqu'il apprend que Bourmont a été nommé commandant du département des Appenins. Il reprend vigoureusement son ministre de  de la guerre par écrit selon ces termes: "Monsieur le duc de Feltre, vous aviez donné le commandement du département des Appenins à l'Adjudant Comandant Bourmont, c'est-à-dire à un ancien Chef chouan. Cette mesure est ridicule. Cet Officier ne devait pas être employé, ou du moins être employé de manière à être surveillé: que voulez-vous que pensent nos troupes d'être commandées par un tel chef?" (Archives de la guerre à Vincennes, Dossier Bourmont). Malgré cette rigueur de traitement, Bourmont, pourtant à bout de patience, s'efforce de croire à un avenir meilleur et écrit à son épouse: "j'obtiendrai de la bienveillance et avec le temps, nous nous réunirons, notre fortune sera en meilleur état et j'aurai la douce satisfaction de te voir exempte des peines et des inquiétudes qui nous ont tant tourmentées depuis notre union." Il espère ainsi que la guerre lui donnera l'occasion de se distinguer et d'obtenir un grade afin de réhabiliter son honneur. Il ne devine pas encore que le destin va lui permettre de donner la pleine mesure de lui-même.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

De brillantes campagnes militaires (1812-1814)

Bourmont n'a qu'une issue pour quitter l'Italie: combattre et forcer l'estime de ses pairs. Il prend ainsi une part active à la campagne de Russie dès la mi-juillet 1812. Il rejoint Moscou où la Grande Armée commence sa retraite et rencontre l'Empereur début novembre qui lui enjoint de retrouver le prince Eugène, resté sur les arrières gardes de l'Armée. Bourmont se bat et est remarqué pour ses qualités de commandement. Le prince Eugène veut obtenir pour lui le grade de Maréchal de camp mais sans succès. "Je ne sais ce que vous avez fait à l'Empereur, car trois fois déjà, il m'a renvoyé votre nom rayé des propositions que je lui ai adressées.  De même pour la Légion d'Honneur. Pourtant, je recommencerai, car vous l'avez bien mérité." (cité par Gustave Gautherot, in p 189).

Il continue de servir sous les ordres du prince Eugène et remplace le général Guilleminot, tombé malade. Mais à Marienwender (en Poméranie polonaise actuelle), pris d'un violent accès de fièvre, sans connaissance et considéré comme mourant, il est abandonné aux mains des Russes. Quand il reprend ses esprits et encore très faible, il réussit néanmoins, à traverser les lignes ennemies pour rejoindre son armée. Le 2 mai 1813, il prend une part déterminante dans la bataille de Lützen, sous les ordres du maréchal Mac Donald. L'Empereur consent à la demande de ce dernier et de plusieurs généraux de sa connaissance à lui accorder la légion d'honneur.

Fin septembre, il est blessé à la tête et doit se faire soigner à Dresde. Quelques jours plus tard, il est fait Général de Brigade sur proposition du général Gérard, en récompense de sa belle conduite. En 18 mois de campagne, il est ainsi reconnu comme un chef de grande valeur.

Le 7 octobre 1813, il participe à la bataille de Leipzig, la bataille des nations qui fait 60 000 morts et est autorisé à prendre un congé, compte tenue de son état de santé. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Quand il rentre en France, il revoit sa famille après 3 ans et demi d'absence. Il est même autorisé à se rendre chez lui, au château de Bourmont qu'il n'a jamais habité avec sa femme, épousée en 1800. Il revient libre dans sa demeure pour la première fois depuis son départ en émigration en 1790 (il s'y est battu pendant la chouannerie en 1794 et 1795). Il est enfin reconnu par le pouvoir en place et a conquis cette reconnaissance par sa seule valeur militaire, au sein des armées napoléoniennes. Mais, alors qu'il goûte à cette joie nouvelle, il est rappelé sur le front en pleine campagne de France dans l'Empire en déroute...

Le général Gérard donne l'ordre à Bourmont de rejoindre Troyes tandis que le maréchal Victor lui demande d'assurer la défense du pont de Nogent-sur-Seine avec 1200 hommes face à 18000 Russes. Il met au point un très habile plan de bataille qui met 6000 Russes hors de combat. Grièvement blessé au genou, sa conduite lui vaut d'être fait Général de Division par Napoléon. Cette désastreuse campagne conduit le Sénat à proclamer la déchéance de Napoléon qui abdique le 6 avril 1814. Louis XVIII entre à Paris le 3 mai, le confirme dans son grade et lui donne, ironie de l'Histoire, le commandement de la 6ème division militaire de Besançon, sous les ordres du maréchal Ney où il est accueilli en héros même si les opposants nombreux - Bonapartistes et libéraux passés dans l'ombre - rendent la mission très délicate.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le drame des Cent Jours (1815)

 

Moins d'un an plus tard, le 5 mars 1815, Bonaparte débarque à Golfe Juan: c'est le début d'une nouvelle période dramatique qui constitue un tournant dans la vie de Bourmont. En effet, alors qu'il récuse le choix du maréchal Ney de rallier Bonaparte, il se rend à Paris au grand galop afin d'encourager le roi à résister. Mais celui-ci quitte les Tuileries en toute hâte et sans donner de consignes précises sur la marche à suivre.

Tandis que Bourmont se met à rédiger un mémoire pour assurer la défense de la monarchie, le général Dessoles, ministre d'Etat lui déclare: "Tout est fini. Je quitte les princes: on ne pense plus qu'à faire ses paquets. On a persuadé le Roi de partir, et S.M. quittera Paris la nuit prochaine. On empêche le Roi de tenter les chances d'un combat. - Que nous reste-t-il donc à faire? demande Bourmont. Quels sont les ordres du Roi? - A une pareille question, le Roi m'a répondu: Je vais aller chercher sur la frontière un point d'appui où je puisse réunir mes amis et les troupes qui me resteront fidèles; si cela se peut, c'est là qu'il faut se rendre; si cela n'est pas possible, et que l'un de mes frères puisse aller dans l'Ouest, c'est autour de lui qu'il faut se ranger...Il est probable que les alliés vont prendre les armes, et cette fois peut-être feront-ils la guerre pour leur propre compte? S'il en est ainsi, agissez dans l'intérêt de la patrie.(...) - En ce cas, conclut Bourmont, je reste ici. L'espoir de combattre m'avait amené à Paris. Je ne peux plus servir à rien d'autre dans une fuite...Je ne comprends pas que je puisse être utile nulle part, puisque les Bourbons abandonnent la capitale sans brûler une amorce." (cité par Gustave Gautherot in Un Gentilhomme de grand Grand Chemin, p 243, tiré de la Conversation reproduite dans la Notice pour servir à la biographie de M. le maréchal de Bourmont, par C. de Bourmont, Paris, Baudoin, 1842.)

Bourmont est mis en état d'arrestation par Ney comme Lecourbe, Clouet et d'autres le 19 mars 1815. Il remet alors sa démission à l'Empereur le 22 qui lui demande de préciser son lieu de résidence. Il rencontre Foucher le 28, redevenu ministre de la police et accepte l'offre du général Gérard le 1er avril qui le nomme général de la 3ème division d'infanterie du IVème corps d'observation. Ce poste lui permet "d'agir à sa guise. Il croit pouvoir concilier sa fidélité monarchique et son ardeur guerrière. C'est donc sans hésiter qu'il accepte la proposition de Gérard." (cité par Pierre Serval, Alger fut à lui, Paris, Calmann-Lévy, 1965). Bourmont sait aussi que le régime bonapartiste est sur le déclin. Foucher lui a donné son sentiment: "l'Empereur est fou, me dit-il et nous ne laisserons pas encore une fois jeter la France dans l'abîme. (...) M. de Bourmont fut amené à l'alternative fatale qui devait peser sur tout le reste de sa carrière: ou se séparer de ses frères d'armes dans les circonstances les plus regrettables, ou marcher jusqu'au bout contre les alliés du roi, qui se disaient aussi les alliés de la France." (entretien de Bourmont avec le comte de Falloux in Alfred de Falloux, Mémoires d'un royaliste, Paris, Perrin, 1888.).

Le 1er juin 1815, en revanche, Bourmont se refuse à signer l'Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire qui proclame la déchéance des Bourbons (320 votes négatifs dont le sien contre 22 200 suffrages positifs). Il l'exprime en langage codé dans une lettre à sa famille et dès ce moment, songe à quitter les armées impériales. Il en informe le général Gérard qu'une indéfectible amitié unit à lui et demande un congé (Gérard écrira à Clarke en novembre 1815: "il (Bourmont) connait le fond de mon cœur et ma pensée toute entière").  L'un est royaliste, l'autre libéral; Gérard est dévoué à l'Empereur et reconnaîtra le régime de Louis-Philippe tandis que Bourmont, légitimiste s'y refusera.

Le 15 juin 1815, Bourmont quitte alors effectivement son commandement en le confiant au général Hulot, également informé de sa décision. Après avoir fait exécuter tous les ordres du général Gérard, il lui fait remettre cette lettre: "Mon général, (...) Il m'est impossible de combattre pour affirmer un gouvernement qui proscrit mes parents et presque tous les propriétaires de ma province; je ne veux pas contribuer à établir en France un despotisme sanglant qui perdrait mon pays, et il m'est démontré que ce despotisme serait le résultat certain des succès que nous pourrions en obtenir. 

On ne me verra point dans les rangs des étrangers; ils n'auront de moi aucun renseignement capable de nuire à l'armée française composée d'hommes que j'aime et auxquels je ne cesserai de prendre un vif intérêt; mais je tâcherai d'aller défendre les proscrits français, de chasser loin de la patrie le système des confiscations, sans perdre de vue la conservation de l'indépendance nationale. (...)" (Minutes de la lettre, archives de Bourmont). Après son départ, sa division prend part aux victoires de Fleurus (le 15 juin) et de Ligny (le 16 juin). Ce même jour, Bourmont arrive à Gand où il se présente à Louis XVIII. Il a traversé les lignes prussiennes et obtenu pour lui-même et son Etat-Major (composé du général Clouet, du chef d'Escadrons Villoutreys, du capitaine d'Andigné et du lieutenant de Trélan) un laisser passer de Blücher qu'il ne rencontre pas. Le 18 juin a lieu le désastre de Waterloo. La France est occupée. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour conclure sur cet épisode, retranscrivons cette note éclairante: "Le général Gérard ne portera pas d'accusation contre Bourmont dans ses écrits postérieurs. Jamais, il ne démentira le fait que Bourmont ait demandé un congé dès le 1er juin 1815. Il ne démentira pas non plus les propos de Monsieur du Peyrou, son ancien aide de camp: "Ni moi, ni le général (Gérard) n'eussions fait ce qu'a fait Monsieur de Bourmont; mais je suis trop juste, le général Gérard aussi pour accuser Monsieur de Bourmont de trahison. Il n'en est rien du tout; le général Gérard a été prévenu de sa décision." "(Gérald de Bourmont, in Note sur la conduite du comte de Bourmont en 1815, juin 2002). Mieux, en 1829, Gérard, vivement attaqué par Grouchy, fait publier en 1829, une brochure sur les événements de 1815: "Il n'est pas vrai qu'il se soit manifesté dans les troupes que je commandais le plus léger signe de désorganisation partielle: il n'est pas exact que le départ du général de Bourmont et de quelques officiers de son Etat Major ait eu une influence fâcheuse sur l'esprit des troupes: au contraire, elles n'en ont montré que plus d'ardeur: les faits parlent plus haut que toutes ces accusations." (Dernières observations sur les opérations de l'aile droite de l'armée française à la bataille de Waterloo, propres à éclairer la question portée devant le public par M. le marquis de Grouchy, Paris, 1829.)

 

Le dignitaire de la Restauration (1815-1828)

A son arrivée à Gand, Bourmont, confirmé dans son grade, est nommé commandement de la 16ème division militaire de Lille par le roi Louis XVIII avec pour ordre de "diriger le mouvement qui allait s'opérer dans les départements du Nord en faveur de la cause royale" (en juin-juillet 1815, lettre du duc de Feltre du 21 juin 1815). Sa mission est délicate car il doit affirmer l'autorité du nouveau gouvernement face aux Bonapartistes et aux étrangers présents sur le territoire français, qui le contestent (1 150 000 soldats étrangers présents sur le sol français). Le 8 septembre 1815, il est nommé commandant de la 2ème division de la garde royale. A son retour à Paris en novembre, il témoigne au procès du maréchal Ney. Suite aux fausses allégations de ce dernier, Bourmont est contraint de préciser son témoignage afin de dégager sa responsabilité et de défendre son honneur (in G. Gautherot, p 236 qui déplore par ailleurs que "la grâce royale n'ait pas permis d'annuler ce lamentable jugement", p 294). Bourmont réside alors à Paris, rue de Choiseul, donne des instructions à son épouse, Juliette pour l'administration de leur domaine agricole en Anjou et se préoccupe des études de ses enfants: "Il n'est point de sacrifice que je ne veuille faire pour l'éducation de mes enfants." (3 novembre 1817).

En 1823, il est appelé à participer à la guerre d'Espagne pour défendre la trône du roi Bourbon, Ferdinand VII, emprisonné par les Libéraux espagnols (congrès de Vérone de 1822). Au sein d'une armée de 100 000 hommes avec pour commandant en chef: le duc d'Angoulême et des militaires de renom (le général Molitor, les maréchaux Moncey et Oudinot entre autres), Bourmont prend part à l'expédition en tant que commandant de l'infanterie de la garde. L'armée des libéraux révolutionnaires des Cortès, forte de 95 000 hommes, leur fait face. Malgré l'opposition libérale, la campagne se déroule avec succès. Bourmont se distingue par les plans et les directives qu'il élabore et qui sont suivis par le ministère de la Guerre. Après la prise du fort du Trocadéro le 31 août 1823, celle de Cadix en octobre qu'il organise permet la libération du roi d'Espagne (sous les ordres du major-général Guilleminot, les plans de Bourmont, soutenus par le duc d'Angoulême, sont approuvés; il reçoit ainsi le commandement de la place). Bourmont est nommé pair de France le 9 octobre 1823 et au départ du duc d'Angoulême, commandant en chef des troupes françaises d'occupation en Espagne. Etabli avec son état-major à Madrid, Bourmont doit organiser la présence française mais tente également de reconstruire la monarchie espagnole. Il développe des liens avec Ferdinand VII, souverain cependant "faible" et "irrésolu" et rencontre des difficultés avec ses ministres. La mésentente de Bourmont avec l'ambassadeur du roi auprès du gouvernement espagnol, Talaru, s'accentue et lui vaut d'être rappelé à Paris le 12 avril 1824. Sa campagne militaire en Espagne aura été un succès mais du point de vue politique, il n'est pas parvenu à consolider la monarchie espagnole, trop faible.

A Paris, après la mort de Louis XVIII le 16 septembre 1824, le général de Bourmont assiste au sacre de Charles X à Reims, en qualité de commandeur de St Louis.

Le 17 février 1828, il crée le Conseil Supérieur de la Guerre et travaille activement à la réorganisation de l'armée. L'année suivante, Charles X le nomme ministre de la guerre au sein du très peu populaire gouvernement Polignac. Il propose de nommer le général d'Ambrugeac à sa place mais le roi, Polignac et La Bourdonnaye le décident à accepter. Il prend un ensemble de mesures qui réforment l'armée en profondeur. Sans augmenter son budget et en réalisant des restrictions dans l'administration et l'équipement des troupes, il augmente la solde des militaires retraités et réserve des emplois civils à des militaires expérimentés. Malgré les attaques de la presse, il œuvre donc activement lorsqu'il est nommé commandant en chef de l'expédition d'Afrique qui doit prendre Alger.

La conquête d'Alger (juillet 1830)

Le général de Bourmont prépare minutieusement l'expédition pendant quatre mois et quitte Toulon le 25 mai à la tête d'une armée composée de 37600 hommes (dont 5 futurs maréchaux tel Mac-Mahon ou de futurs généraux comme Lamoricière) et plus de 600 vaisseaux. Malgré la mésentente de Bourmont avec Duperré, commandant de la flotte, le premier suit précisément le plan établi en 1808 par l'officier du génie Vincent-Yves Boutin (envoyé comme espion par Napoléon qui envisageait cette expédition) et débarque à Sidi Ferruch le 13 juin. Les troupes de la régence ottomane sont repoussées. Le 24 juin a lieu l'offensive de Sidi-Khalef qui rapproche l'armée d'Alger. Amédée de Bourmont, second fils du général, est mortellement blessé au combat de Sidi-Ibrahim. Le 29 juin a lieu l'attaque du Fort de l'Empereur, clef de la ville, qui tombe après quelques jours de siège le 4 juillet. Le lendemain, la ville capitule. Bourmont reçoit son bâton de maréchal le 24 juillet et poursuit l'occupation de Mers-el-Kébir, prend Oran, Bône en obtenant le départ des Ottomans.

A la suite de la révolution de juillet 1830, qui conduit à l'abdication de Charles X et à l'avènement de son cousin, Louis-Philippe d'Orléans, Bourmont reçoit son ordre de retour en France et transmet son commandement au général Clauzel. Fidèle aux Bourbons, c'est-à-dire, au petit duc de Bordeaux (comte de Chambord), prétendant légitime au trône de France, il refuse de prêter serment au nouveau roi, renonce à la brillante carrière à laquelle il aurait pu prétendre et s'exile en affrétant un vaisseau à ses frais et en emportant le cœur de son fils. 

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Citadelle de Besançon, en Franche-Comté
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Le maréchal Étienne Maurice Gérard, par Jacques-Louis David

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Le Passage des souverains alliés sur le boulevard Saint-Denis en 1814, 

par Johann Zippel, 1815, musée Carnavalet.

En tête chevauchent Alexandre 1er de Russie monté sur un cheval blanc et Frédéric-Guillaume III de Prusse, sur un bai. A leurs côtés, trois Feldmarschalle, l'Autrichien Schwarzenberg, le Prussien Blücher et le Russe Barclay de Tolly suivis par les états-majors des coalisés, qui tous ont eu à subir l'occupation de leur capitale par les troupes napoléoniennes; tiré du catalogue de l'exposition, "Napoléon et l'Europe", organisée au musée de l'Armée de mars à juillet 2013.

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Juliette de Becdelièvre, comtesse de Bourmont, épouse Louis-Auguste Victor, comte  de Bourmont le 2 avril 1800 à Paris.

Le couple aura sept enfants et entretiendra une correspondance régulière et tendre, véritable soutien mutuel dans les épreuves. Cette femme d'exception suivra son époux dans l'Europe entière et fera admirablement face aux difficultés dans les étapes de leur vie commune (prison, exil, campagnes militaires).

Profil satirique de Napoléon au visage composé de cadavres, signé G.Schulze et J.Dean, d'après Johann Michael Voltz, 1er semestre 1814, détail d'une estampe coloriée. Paris, BNF.

Cette estampe, d'origine allemande, présente un motif repris à Londres pour une diffusion dans toute l'Europe. Elle fait référence au champ de bataille qu'est l'Allemagne de 1813 avec les batailles de Kolzbach, Leipzig, Hanau...Elle rappelle les thèmes de "l'universelle araignée qui a pris dans ses rets l'Europe" et la monstruosité  du chef de guerre, tiré du catalogue de l'exposition "Napoléon et l'Europe, organisée au musée de l'Armée, de mars à juillet 2013.

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Imagerie d'Epinal

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